New light on Sor’s La Despedida (Les Adieux) op. 21

Sor’s La Despedida (Les Adieux) op. 21, in the newly discovered Spanish edition, has the word “Paisiello” written above the music at the beginning of the Allegretto.  Until now, it has been a mystery why that word is there.

But now Sébastien Lemarchand, a guitarist in France, has kindly sent me a text which he has written, in which he points out that the composer Paisiello died on 5 June 1816, just under two months before 28 July 1816, the date on which it seems likely that this piece was first performed by Sor and the violinist Vaccari.  Is the piece in fact a homage to Paisiello, a lament on his death?

If so, then the title itself, “La despedida” or “Les Adieux”, may mean that the piece is a farewell, an adieu, to Paisiello.

Here is Sébastien Lemarchand’s text, which is in French. The music of Sor’s La Despedida op. 21 may be found in Sor’s New Complete Works for Guitar, volume 3.

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« Les Adieux » de Fernando Sor est une fantaisie pour guitare dédiée à son ami violoniste Francisco Vaccari. La plus ancienne édition que nous ayons actuellement apporte un nouvel éclairage sur cette pièce. En effet, les éditions Tecla viennent de rééditer l’intégrale des oeuvres pour guitare de Fernando Sor en 2002 avec notamment la découverte d’une partition provenant de la fondation Joaquín Díaz et qui s’intitule « La Despedida ». Cette version espagnole des Adieux aurait été publiée en 1824, à savoir un an avant l’édition de Meissonnier.

Voici le titre qui préfigure cette édition : La Despedida, Andante y Allegretto para Guitarra sola, de D. Fernando Sor, dedicada a su amigo Don Francisco Vaccari, Primer Violin de la Real Camara, y de la Capilla de S.M.C.

De nombreuses indications sont différentes avec notamment le mot « Paisiello » qui se trouve au début de la seconde partie (Allegretto). Ce mot n’est pas présent dans l’’édition de Meissonnier et apporte donc un nouvel éclairage sur la pièce.

G. Paisiello (1749-1816) est un compositeur d’opéra de style napolitain et fut très célèbre à son époque. Il fut joué partout en Europe et Fernando Sor l’a sans doute déjà entendu lorsqu’il était à Paris et son opus 16 sont des variations sur « Nel cor più non mi sento » de « La Molinara » de G. Paisiello, thème qui a été repris par de très nombreux compositeurs de l’époque (Beethoven en fit aussi des variations). Fernando Sor est très marqué par l’opéra et il en composera lui-même quelques-uns, mais il adaptera surtout de nombreux thèmes et variations sur des airs très connus de l’époque (Variations sur un thème de « La flûte enchantée ») comme le fit aussi Giuliani avec ses Rossiniane.

« Les adieux » ou « La despedida » commence avec une ouverture orchestrale de 8 mesures quasi identique à son opus 9 (introduction et variation sur l’air « O cara armonia » de « La Flûte enchantée » de Mozart) et nous introduit tout de suite dans une écriture orchestrale de la guitare.

Le premier énoncé sur « una corda » peut être envisagé comme l’hommage à son ami violoniste. Après l’introduction, c’est ce duo très expressif (la mélodie au violon bien sûr et l’accompagnement de la guitare) qui annonce véritablement le début de la pièce. Nous avons plusieurs documents qui indiquent que les deux musiciens ont joués ensemble et cette pièce aurait été créée le 28 juillet 1816. A l’image d’un dernier concert, les deux musiciens se retrouvent le temps d’un duo.

Ensuite, Sor nous emmène sur le ton relatif de Sol majeur avec beaucoup d’effets dramatiques (pédale, accords diminués, point d’orgue) et c’est un premier acte qui se termine sur une cadence en sol majeur mesure 43. On y retrouve toute les idées musicales de Fernando Sor et j’insiste encore sur le côté opéra de cette première partie.

Une transition brutale avec l’accord de dominante de la mesure 44 nous fait véritablement basculer vers quelque chose de dramatique, accentué par le contraste accord/harmonique forte/piano et rythme pointé. Ici, plus de place au chant et c’est bien le côté visuel, dramatique qui se fait ressentir.

Paisiello est mort à peine deux mois plus tôt à Naples le 5 juin 1816. Je pense que de nombreux compositeurs comme Fernando Sor ont été touchés par sa disparition et c’est un hommage que lui rend ici le guitariste. Nous retrouvons à cet endroit une longue pédale de si en rythme pointé qui figure musicalement la mort de ce grand musicien.

L’indication ralentando et morendo deux mesures avant la double barre en est que plus chargée de sens. Il est vraiment intéressant à cet endroit de faire le lien avec la « Fantaisie élégiaque » opus 59 qu’il a dédiée à Charlotte de Beslay, son élève mais aussi pianiste qui mourut très jeune lors de son premier accouchement. Juste avant la marche funèbre qui termine la fantaisie, Sor reprend le même procédé de pédale de si et de rythme pointé. La construction de la pièce est quasiment identique, la symbolique de la mort et finalement de continuité par la musique est interprétée par une marche funèbre pour Charlotte et un Allegretto pour Paisiello. On se doute que la douleur fut beaucoup plus intense à l’annonce du décès de Charlotte que pour celle de Paisiello.

Aussi l’Allegretto final résonne à la fois comme un souvenir de l’air de « La Molinara » avec des similitudes du point de vue mélodique (notes répétées, levées, appoggiature) et comme un hommage au compositeur avec ce caractère d’écriture légère et accessible à tous, une mélodie qui reste dans nos mémoires.

Cette interprétation de cette oeuvre ne repose que sur des suppositions historiques en partie vérifiées mais bien sûr, les idées avancées, notamment sur l’hommage de Paisiello omniprésent dans cette pièce, ne peuvent être à ce jour vérifiées. Cependant, en comparaison avec d’autres oeuvres de Fernando Sor, le fait d’imaginer cette trame permet une exécution cohérente du point de vue dramatique mais aussi de penser tout au long de la pièce aux couleurs orchestrales et aux contrastes musicaux et narratifs omniprésents dans les opéras de l’époque.

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Sébastien Lemarchand is professeur de guitare à L’Ecole Nationale de Musique de Saint-Brieuc and a member of the guitar quartet Amanecer.

The new Tecla re-engraved edition of Sor’s La Despedida (“Les Adieux”) is available from Tecla in Volume 3 of Sor’s New Complete Works for Guitar.

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